Être mère ne suffit pas pour être aimée

La Fête des Mères approche. Une date qui, pour beaucoup, rime avec émotion, gratitude et souvenirs heureux. On voit défiler les photos d’enfance, les messages doux, les “je t’aime maman” qui remplissent les réseaux sociaux. Une vague d’amour, d’hommages, de fleurs et de cœurs. Mais derrière cette façade, il y a une autre réalité. Une réalité silencieuse, souvent tue, parfois honteuse : celle de ceux et celles qui ne ressentent rien. Ou pire, qui ressentent de la colère, de la tristesse, du rejet. Et il est grand temps de le dire franchement, sans détour : non, être mère ne suffit pas pour être aimée.

On ne peut pas exiger l’amour simplement parce qu’on a donné la vie. On ne peut pas forcer un lien qui n’a pas été construit. On ne peut pas demander de l’affection à un enfant que l’on n’a pas su aimer, écouter, protéger ou comprendre. Et pourtant, des milliers de personnes vivent ce paradoxe chaque année : célébrer une figure maternelle qui n’en a jamais été une dans les faits. Se forcer à offrir des fleurs à une femme qui n’a semé que l’indifférence, la critique ou la douleur.

Le mythe de l’amour maternel inconditionnel

Depuis l’enfance, on nous martèle une idée simple, puissante, rassurante : l’amour d’une mère est inconditionnel. Universel. Naturel. C’est le socle. La base. La certitude absolue. Mais cette idée est un mythe. Et comme tous les mythes, elle crée de la souffrance quand la réalité ne colle pas à la promesse. Car non, toutes les mères n’aiment pas de façon inconditionnelle. Non, toutes les mères ne protègent pas. Non, toutes les mères ne sont pas douces, soutenantes ou présentes.

Certaines sont froides, distantes, préoccupées par elles-mêmes. D’autres sont carrément destructrices : elles critiquent, manipulent, étouffent, contrôlent, sabotent. Parfois, elles sont simplement dépassées, émotionnellement absentes ou inconscientes de leurs propres blessures. Et ce sont leurs enfants qui paient le prix.

Ce qui fait mal, ce n’est pas seulement ce manque d’amour. C’est l’impossibilité d’en parler. Parce que dire qu’on ne ressent rien pour sa mère, ou pire, qu’on la rejette, c’est tabou. C’est socialement inacceptable. C’est perçu comme une trahison, une monstruosité.
Alors on se tait. On intériorise. On culpabilise.

Tu as le droit de ressentir ce que tu ressens

Tu n’as pas à aimer ta mère “parce que c’est ta mère”. Tu n’as pas à t’obliger à passer un coup de fil, à écrire un message, à offrir un cadeau, si chaque geste te donne la nausée. Tu n’as pas à entretenir un lien par devoir, au détriment de ta santé mentale. Tu as le droit de poser des limites. De prendre de la distance. De ne plus répondre. De couper totalement si c’est ce qu’il te faut pour survivre. Et ce droit ne fait pas de toi une mauvaise personne. Il fait de toi une personne qui se respecte.

Parce que le lien du sang n’excuse pas tout. Il ne donne pas carte blanche pour maltraiter, humilier, infantiliser ou étouffer. Et pourtant, combien continuent de subir, de ravaler leurs émotions, de minimiser ce qu’ils ont vécu ? “C’est pas si grave”, “elle a fait ce qu’elle a pu”, “elle était comme ça avec tout le monde”… Toutes ces phrases sont des prisons mentales. Et elles entretiennent la blessure.

Tu n’as pas à excuser ce qui t’a détruit. Tu peux comprendre, mais tu n’as pas à pardonner pour te libérer. Ta guérison n’a pas besoin de sa reconnaissance. Elle commence avec toi.

La loyauté familiale : un piège invisible

Il existe une forme de loyauté familiale aussi puissante que toxique. Celle qui te pousse à protéger ceux qui t’ont fait du mal. À faire passer leur image avant ton intégrité. À maintenir une façade pour ne pas “faire de vagues”. Et cette loyauté, tu la traînes souvent depuis l’enfance. On t’a appris à obéir, à te taire, à ne pas faire de peine à maman. Tu as grandi avec l’idée qu’aimer, c’était accepter. Tout accepter. Même l’inacceptable.

Alors tu restes. Tu appelles. Tu réponds. Tu offres des fleurs pour ne pas te sentir coupable. Mais à chaque fois, tu t’éloignes un peu plus de toi-même.

Il est temps de comprendre une chose essentielle : la loyauté envers ta famille ne doit jamais te coûter ta paix intérieure. Tu peux honorer ton histoire sans sacrifier ton présent. Tu peux respecter ton passé sans te trahir aujourd’hui. Et tu peux cesser de jouer un rôle pour enfin te reconnecter à ton authenticité.

Être une mère, ce n’est pas seulement accoucher

Une mère, ce n’est pas juste une femme qui a accouché. C’est une femme qui aime. Qui voit. Qui soutient. Qui donne sans détruire. Qui encadre sans enfermer. Qui accompagne sans manipuler.

Certaines femmes ont donné la vie, mais n’ont jamais appris à aimer. Par manque de modèle, de conscience, de guérison personnelle. D’autres n’ont jamais eu d’enfants, et pourtant, elles ont été des mères de cœur : tantes, sœurs, professeures, amies, thérapeutes… Des femmes qui ont su te prendre dans les bras sans condition. T’écouter sans jugement. Te valoriser sans agenda.

Ces femmes-là méritent parfois plus que n’importe quelle génitrice le titre de “maman”.

Alors en cette Fête des Mères, tu as le droit de choisir à qui tu veux rendre hommage. À qui tu veux dire merci. À qui tu veux offrir ton amour. Et tu as aussi le droit de ne rien célébrer du tout.

Guérir ne veut pas dire oublier

Tu n’es pas obligé(e) d’oublier pour guérir. Tu n’as pas à “passer à autre chose” comme si de rien n’était. Guérir, ce n’est pas effacer le passé. C’est arrêter de le laisser gouverner ton présent. C’est reprendre ton pouvoir. C’est comprendre ce qui s’est passé. Nommer les choses. Et décider que tu ne veux plus vivre dans le silence ou la soumission.

Guérir, c’est parfois couper le contact. C’est parfois écrire une lettre qu’on n’enverra jamais. C’est parfois pleurer des jours entiers. C’est parfois se faire accompagner pour apprendre, enfin, à s’aimer soi.

Et ce chemin-là, il est digne. Il est noble. Il est courageux.
Parce que rompre avec une mère toxique, c’est rompre avec toute une éducation. C’est affronter la peur du jugement. C’est réapprendre à respirer, sans autorisation. Mais une fois que tu y goûtes, cette liberté n’a pas de prix.

Ce que tu dois retenir

Tu ne dois rien à ta mère, si ce qu’elle t’a donné t’a détruit.
Tu ne lui dois ni pardon automatique, ni reconnaissance vide de sens, ni attachement sacrificiel.
Tu as le droit de poser tes conditions, même à elle.
Tu as le droit de ne pas ressentir d’amour.
Tu as le droit de t’éloigner pour te protéger.
Tu as le droit d’aimer d’autres personnes à sa place.
Et tu as surtout le droit de te choisir, toi.

La Fête des Mères ne doit pas devenir une torture. Elle peut devenir un moment de vérité. Un moment d’honnêteté intérieure. Un moment pour se demander : qui m’a réellement aimé ? Qui m’a fait grandir ? Qui m’a regardé(e) avec douceur ? Et parfois, la réponse est : personne. Mais c’est aussi une invitation à être, dès aujourd’hui, le parent qu’on n’a jamais eu.

Si tu ressens le besoin de te reconnecter à toi-même, de guérir les blessures du passé et de retrouver un ancrage intérieur solide, je te recommande vivement ces 52 exercices de reconnexion à soi.

Ils ont été créés par Francis Machabée, un professionnel en psychologie positive dont l’approche m’inspire profondément. Ce qu’il propose n’est pas théorique : c’est concret, humain, accessible. Et surtout, ça fonctionne. C’est le genre de pratique qui t’aide à te reconstruire doucement, à ton rythme, sans forcer. Un outil précieux si tu veux sortir des loyautés toxiques et retrouver ton pouvoir personnel.

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Par Gabriel Tellier

Gabriel Tellier bouscule les certitudes et pousse à l’action. Avec un regard lucide et des conseils concrets, il aide à mieux comprendre ses blocages, à se remettre en question et à avancer vers une vie plus épanouissante.